mercredi 31 octobre 2012

Petroplus. La responsabilité historique


Les salariés de Petroplus au siège de Shell à Paris
Reléguer aux oubliettes, vite, ces mines déconfites au sortir du tribunal de commerce mardi 16 octobre dernier. Il faut dire que ce jour-là, la liquidation de la raffinerie Petroplus de Petit-Couronne (470 personnes) est prononcée, malgré deux offres de reprise. Alors hier toute la journée, en «faisant le siège» de Shell à Colombes dans les Hauts-de-Seine, les raffineurs retrouvent de la voix, du souffle, renouvellent leurs arguments pour mettre leur ancien propriétaire dans la balance des négociations, d'une reprise tant espérée, annoncent que plusieurs repreneurs (quatre ou cinq) se sont manifestés, ont toujours la possibilité de se «déclarer» jusqu'au 5novembre, date limite du dépôt des offres fixée par le tribunal de commerce de Rouen.

Trois cars, les pancartes avec les slogans d'usage… Les «Petroplus» partis vers 8 h hier de la raffinerie ont pris la direction de Colombes, à deux pas de la Défense, pour défendre leur bien, leur raffinerie. «On est là pour rappeler à Shell son implication et lui demander des comptes», glissent les salariés. Toute la question est de savoir si Shell se sent impliquée, au-delà du contrat passé avec la raffinerie, lui assurant quelques mois de travail. La délégation des salariés, reçue à 11 h, ressort une heure et demie plus tard, pas franchement convaincue, prête à se battre toujours. Et c'est ce qu'elle va faire. S'attendait-elle à autre chose, à une autre réponse de la part de Shell? La voici, résumée par le président de Shell France. «Nous comprenons les inquiétudes des salariés de la raffinerie Petroplus. Depuis janvier, Shell coopère avec l'administrateur afin de faciliter la transition avec un repreneur… Nous continuons d'espérer une issue favorable d'ici là». Un communiqué signé par le président, Patrick Roméo.

Alors les salariés de la raffinerie - qui pour bon nombre ont remis les casques et chasubles estampillés Shell pour montrer d'où ils viennent - s'insurgent forcément. «On ressort de ce bâtiment avec rien. Pas de reconnaissance d'une responsabilité sociale. Nous sommes des parias!», tance Laurent Patinier pour la CFDT. «On ne s'attendait pas à des miracles, reconnaît toutefois Yvon Scornet, autre porte-parole de l'intersyndicale. Shell nous dit qu'elle a fait des efforts très importants en prêtant son concours au redémarrage de la raffinerie… Maintenant, que Shell reprenne l'opération à son nom, elle dit non. Qu'elle aide le repreneur, qu'elle mette la main à la poche pour aider à la reprise, c'est non également. Tout ce que la direction accepte, c'est d'assurer l'assistance technique jusqu'en 2014. Tout ça n'est pas acceptable».

Autre sujet abordé, sans réponse favorable: la question des rentes temporaires. «Les salariés considèrent que les années de pénibilité alignées en faisant les quarts l'ont été largement sous l'ère de Shell, explique Laurent Patinier. Ceux qui sont concernés devaient partir plus tôt à la retraite, jusqu'à cinq ans. Shell a largement profité de ces salariés, a produit des richesses grâce à eux. Alors Shell va se retrouver avec 400 plaintes. On va continuer sur le fait que Shell a toujours cette responsabilité historique».

Hier après-midi, une délégation de la raffinerie avait par ailleurs rendez-vous à Matignon, dans la foulée de la récente rencontre avec le président François Hollande. «Le combat continue, pour l'avenir de Petit-Couronne et du raffinage en France».

Shell toujours dans les têtes
Affecté à l'inspection électrique, Christian Anquetil affiche 56 ans, et 34 ans d'ancienneté. Il a ressorti son casque et sa veste Shell, sa carte d'accès à la raffinerie de Petit-Couronne. «J'ai toujours considéré que Shell n'aurait jamais dû partir. Puisque c'est le cas, nous lui rappelons ses responsabilités, sociales, environnementales, sur l'emploi».

«Le gouvernement est à notre écoute»
Hier soir, les salariés de Petroplus ont eu un entretien à Matignon, en présence de représentants de l'Elysée, du redressement productif. «Le gouvernement a pleinement conscience du non-engagement de Shell. Nous espérons que des intentions fortes se manifesteront le 5 novembre, que les administrateurs prendront le temps de les examiner».

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